Marche sur une fourmi, et mille autres t'attaqueront.

Siegfried ∞ Kurt

Siegfried était un fin observateur. C’était une des choses que Kurt appréciait beaucoup chez lui. À deux, Kurt aimait croire – et le doute n’était pas possible à l’entendre parler – qu’il n’y avait pas meilleure équipe. D’ordinaire, les équipes de Rafleurs se composaient de trois personnes minimums. C’était pourtant assez épisodique lorsque les deux comparses en intégraient un troisième dans leur groupe. Certaines expériences n’avaient pas été concluantes avec d’autres collègues : des rivalités, des jalousies, des prises de bec. Heureusement, ce n’était pas le même cinéma à chaque fois. À deux, ils arrivaient à faire des miracles. Mais cette fois-ci le nombre avait son importance. Ce que lui soufflait Sieg dans l’oreille eut deux effets contradictoires sur Kurt. Tout d’abord, une phase d’inquiétude éphémère, un calcul rapide des forces en place et le danger auquel ils s’exposaient. Puis, l’excitation, le goût du risque et l’envie de jouer. Pour simple réaction, ses lèvres l’élargirent et il craqua les vertèbres de son cou. C’était peu chez lui, mais il n’avait pas d’autres choix que de se contenir. Sieg qui le connaissait assez bien devait avoir perçu son énervement à l’idée de faire un carton.

- Le double me convient, mon cher.

Kurt qui se fichait dorénavant éperdument de ce qu’il aurait dans l’assiette, commanda la première chose qui lui vint à l’esprit. Ce fut au tour de Maslov qui demanda s’ils servaient toujours des petits palmiers à la cannelle. Il eut un moment de flottement. Le serveur se pinça les lèvres mal à l’aise. Maslov répéta sa commande et le sorcier en costume réglementaire rejoignit les cuisines.

- Commander un des palmiers de cannelle, quel drôle d’idée mon ami. Ce n’est pas vraiment un plat consistant. Ces étrangers alors…

Kurt avait beau sourire, c’était un parfait dédain qu’on pouvait sentir chez lui. Son cerveau trépignait à l’idée de tout ce qu’ils allaient pouvoir faire à ce pauvre garçon. Déjà, il faisait l’inventaire de toutes les possibilités d’actions et surtout de tortures, si bien que le superviseur semblait avoir les yeux dans le vague. Maslov, lui, bouillonnait de tension. Malgré son air ailleurs, Kurt restait attentif. Dans une telle situation, il fallait savoir surveiller ses arrières tout en faisant semblant de les ignorer. Pour le coup, il était plutôt bon à ce jeu. Ses pupilles suivaient avec discrétion le déplacement des serveurs, les changements de postures des clients. D’ailleurs, ces derniers n’étaient pas bien nombreux. La table à leur droite était dorénavant vide. Ce détail attira l’attention de Kurt. Étrange, il avait eu l’impression en arrivant dans le restaurant que le couple n’en était qu’à l’apéritif. Laissant Sieg surveillait leur futur cobaye, il promena son regard sur la pièce. Une serveuse parlait doucement à une autre table, avec un sourire avenant sur les lèvres. Rien de très étrange jusque-là. Quelques secondes plus tard, les occupants de la tablée prenaient cependant leurs affaires et dépassaient la porte d’entrée.

Ok, quelque chose clochait. Le restaurant se vidait au fur et à mesure d’une manière si douce, si silencieuse qu’il fallait véritablement surveiller les environs pour le remarquer. Le personnel de l’établissement, lui, ne semblait s’inquiéter de rien. Jusqu’à ce que Kurt croisa le regard d’une plongeuse de l’autre côté de la porte des cuisines. Des yeux durs, prêts à passer à l’action.
Kurt n’attendit pas plus longtemps, il attrapa son collègue par le col de son manteau et le tira par le bas. À peine un dixième de seconde plus tard, un jet de lumière passa à l’endroit exact où s’était trouvée la tête de Siegfried. Dans l’agitation, Maslov essaya de se faire la malle, ce à quoi Kurt répondit par un « Incarcerem » qui lia les jambes de l’estonien.

- Espèce d’enfoiré…, grogna Kurt en comprenant dans quel piège ils venaient de tomber.

Plusieurs sorts s’échappèrent de baguettes dont il n’arrivait pas à voir l’emplacement. Des cuisines sans aucun doute. Ils devaient se barrer d’ici. Mais hors de question de partir sans Maslov. Avec la table renversée devant eux comme un bouclier, le Rafleur balançait tout un tas de sorts, de l’entrave au plus sanglant, en espérant faire mouche malgré le peu de visibilité. Siegfried avait eu raison, ils étaient tous de mèche.

Rester ou faire un carton ? Entouré de la sorte, la décision n’était pourtant pas facile pour Kurt qui n’avait faim et soif que de violence et de vengeance à cet instant.

Siegfried ∞ Kurt

Des braises s’échappèrent du boulet ardent qu’avait créé Siegfried avec ses sorts simultanés. La chute du projectile sur les cuisines fit s’élever plusieurs cris. Des flammes commencèrent doucement à lécher les murs, nourries par les herbes et huiles nutritives qui y étaient stockés. Kurt était comme un enfant devant ce spectacle. Un enfant fou. La destruction était alléchante, tentante. Il aimait ce qu’il voyait, il aimait le désordre et le chaos que son comparse avait créé. La couleur chaude des flammes se reflétait dans ses yeux et la chaleur caressait son visage. Douce caresse. C’en était fini, Kurt avait laissé sa nature destructrice, de sociopathe, prendre le dessus. Là où il aurait dû être paniqué, où il aurait dû chercher un moyen de sauver sa peau et celle de Siegfried, le superviseur n’avait qu’une envie : se rapprocher des flammes qui grandissaient inlassablement pour les contempler de plus prêt en train de ronger la chaire de ceux qui s’étaient fait piéger. Mais la voix de Sieg le rappelait toujours à l’ordre. C’était aussi pour ça qu’il aimait avoir ce mangemort en compagnon de galère. Sans même le faire exprès ou faire d’effort particulier, il réussissait à lui garder les pieds sur terre. Néanmoins, ça n’enlevait pas pour autant la tentation qui s’offrait à lui. Siegfried dû cependant lui poser plusieurs questions pour que Kurt daigne mettre de la distance entre ses pulsions et lui-même.
Si on ne prenait en compte que son envie, la réponse aux interrogations de Rowle était toute simple : on les crame tous. Sa conscience professionnelle faisait tout de même barrière à ce désir brûlant. Ils avaient sous la main une bande de traîtres à leur sang, ils ne pouvaient pas passer à côté de cette chance. C’était bien malgré lui qu’il tourna la tête vers son ami, s’arrachant à la délicieuse vision des flammes.

On garde Maslov et on essaye d’en chopper un autre. Deux si on y arrive. Les autres, on les crame. On va avoir de quoi s’amuser.

Un terrible sourire, témoignant de toute la noirceur du personnage, de son addiction à la terreur et la souffrance des autres, s’étira sur son visage. Certains ne pouvaient se passer d’alcool, de drogue, de sucrerie, de sexe, lui, c’était ces cris atroces. Pour rien au monde il ne s’en passerait.
La difficulté était de mettre la main sur l’un d’entre eux dans tout ce fatras. Maslov n’avait pas beaucoup de chance d’en réchapper, mais les autres étaient plutôt sur le qui-vive. Kurt repéra une femme penchée sur un blessé. Il le fit remarquer à Siegfried.

Si on n’arrive pas à en avoir d’autres, c’est elle notre proie.

Il avait à peine fini sa phrase qu’un nouveau sort vola dans leur direction, les manquant de peu. Kurt grommela et sortit de sa cachette pour répondre à leur assaillant. Un protection suivit d’un endoloris, Macquarie ne touchait pas sa cible à tous les coups, mais au moins, il la faisait perdre du terrain. Le but : se rapprocher de la femme en retrait des autres.
D’un signe de tête, il fit comprendre à Siegfried de s’emparer de la fille. Kurt, lui, attirerait l’attention des sorciers tenant encore debout. Malgré toute la stratégie qu’il pensait avoir fait preuve. Les cuisiniers en herbe restaient plus nombreux qu’eux deux. Même avec des collègues à terre. C’était un jeu de chaque instant de passer à travers les mails du filet, à lancer des sorts à la voler pour tantôt se protéger, tantôt attaquer. Il essayait de laisser la voie libre à Siegfried, mais ce n’était clairement pas le plus évident.
Soudain, celui qui semblait avoir pris la tête de la troupe des ennemis baissa sa baguette. Kurt aurait pu – aurait dû ! – profiter de cet instant pour assainir un coup fatal. Son orgueil, sa curiosité et son goût du jeu lui fit faire une belle erreur.

Feudeymon, dit-il d’une voix presque apaisée.

Et Kurt comprit aussitôt le piège dans lequel il était tombé. Le sort avait été lancé au pied du sorcier opposé, là où quelques braises dansaient à la lumière des sortilèges. Ils avaient attiré les deux mangemorts, s’étaient mis en retrait rien que pour attendre ce moment. Ce moment où l’opération kamikaze allait permettre d’effacer toutes les traces, toutes les preuves de l’existence d’un groupe de terroriste dans ce restaurant, et avec ça, allé emporter leurs ennemies. Ces sorciers préféraient se sacrifier que de finir entre les mains des mangemorts.
Il ne restait plus qu’à espérer qu’il ait raté son coup. Le visage crispé et déterminé du sorcier à la « bombe » s’imprima sur la rétine de Kurt. En dernier recourt, le rafleur lança un sort de protection qui les engloba Siegfried et lui, avant de fermer les yeux d’instinct en attendant la sentence.

Dé 1 :
Réussite : le sortilège Feudeymon réussit
Échec : le sortilège Feudeymon échoue
Dé 2 (à prendre en compte que si le Feudeymon réussit) :
Réussite : le sort de Kurt tient le choc face à l’attaque et les protège.
Échec : le sort de protection s’affaiblit face à la puissance du Feudeymon et ils doivent trouver un autre moyen de s’en sortir… HAHA !