« Serdaigle ! » avait spontanément décidé le Choixpeau Magique, alors que la petite Elen, tout juste âgée de onze ans, venait de s'asseoir sur le tabouret faisant face à la bonne centaine de nouveaux élèves de Poudlard.
Ses parents n'en avaient été ni fiers, ni honteux. Tous deux étaient déçus que leur fille ne suivent pas leurs traces en réalité, et ne manquèrent pas de le faire savoir la première fois qu'elle rentra à la maison, le temps des vacances de Noël. Avec une mère qui avait fièrement porté les couleurs de Serpentard durant sa scolarité, et un père qui avait défendu celles de Pouffsouffle, la nouvelle avait eu un peu de mal à passer. Toutefois, la jeune fille n'avait jamais été particulièrement affectée des réactions de ses parents. La fillette était toujours passée au second plan, derrière ses deux frères aînés qui eux, avaient su être envoyés à Serpentard.
Il faut dire qu'Elen était une gamine très créative et parlant très souvent toute seule…. Ce qui pouvait placer ses parents dans des situations un peu gênantes, face à d'autres sorciers parfois.
Tous deux avaient passé son enfance à se disputer sur des sujets que Elen, qui n'était alors qu'une fillette n'avait pas su saisir. A se demander comment ces deux-là avaient pu se marier de leur plein-gré. Très jeune, elle avait pris l'habitude de leur déception, elle passait outre et regagnait sa petite bulle chaque fois que les choses tournaient en eau de boudin. Ses amies, réelles, végétales ou imaginaires suffisaient amplement à la faire sourire, de toute manières.
En y repensant, Elen songeait que c'était peut-être avec elle, en réalité, qu'avait débuté les ennuis. Ses deux frères aînés avaient su tout faire correctement, eux. C'était la première pensée qui lui revint en tête lorsqu'une petite fille rousse poussa la porte de sa boutique, accompagnée de ses parents. Une famille unie, avec une volonté visible de le rester.
« Ton intelligence, même si elle ne saute pas aux yeux de tous, te permettra de faire les bons choix » lui avait même prédit le professeur Trelawney, durant sa quatrième année. Cette femme avait un véritable don pour faire des compliments que l'on hésitait à considérer en tant que tel. Cela n'avait pas échappé à Elen.
« Je ne sais pas si elle a vu clair un jour cette voyante, marmonait la sorcière avec un sourire à l'adresse de sa Botruc Gamora, planquée quelque part dans les replis de sa blouse, tandis qu'elle gardait un œil attendrit vers la fillette qui observait avec curiosité les pousses de branchiflores exposées dans le magasin. En se remémorant la prédiction de Sybille Trelawney, l'Herboriste demeurait persuadée de n'avoir jamais su prendre la moindre décision lors du choix le plus important qu'on lui eut imposé.La nièce de Horace Slughorn avait vu sa famille se fragmenter petit à petit, jusqu'à exploser totalement le jour où Voldemort se retrouva à la tête du pays. Entre un père fermement attaché aux idées de l'Ordre du Phénix et une mère beaucoup plus tentée par l'idéologie du Mage Noir, la jeune sorcière fut incapable de choisir son camps lorsque tous deux le lui demandèrent. Elle avait rompu tout contact, purement et simplement, dès ce jour-là.
A l'époque, Elen trouva un certain réconfort auprès de son oncle qui, bien que refusant depuis toujours d'accepter le mariage de son frère Travis avec cette ancienne serpentard en qui il n'avait jamais eu la moindre confiance, accepta bien volontiers de l'accueillir chez lui.
La sorcière n'avait jamais été proche de son oncle, et cela n'avait pas changé malgré les quelques années passées sous son toit. Toutefois, lorsqu'elle pensait à lui, elle était toujours reconnaissante et culpabilisait presque de n'avoir jamais cherché à lui rendre la pareille, d'une manière ou d'une autre.
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Cependant, la jeunesse troublée par les conflits familiaux d'Elen n'empêcha jamais cette dernière de garder le sourire. A l'école, elle avait été une élève souriante et sérieuse, passionnée d'Herbologie depuis sa première rencontre inattendue avec le saule cogneur de Poudlard.
Impressionnée dès le premier coup d'oeil, Elen s'en était approchée tant et si bien que l'arbre colérique avait entortillé l'une de ses branches autour de sa cheville pour l'envoyer balader un peu plus loin. Contrairement à n'importe qui d'autre, qui se serait simplement estimé heureux d'être encore en vie après un tel vol plané, l'élève de Serdaigle se passionna dès lors ce Saule et revint le voir de très nombreuses fois. Par la suite, l'Arbre, sans doute plus fier de sa personne que l'on voulait bien le croire, ne montra plus signe d'agressivité envers la jeune sorcière.
La jeune fille qu'elle était s'arrangeait parfois pour être mise en retenue, dans le seul but d'être envoyée dans la forêt interdite où elle pouvait découvrir toutes sortes de plantes qu'elle ne trouvait nulle part ailleurs dans le château. Les professeurs Dumbledore et Chourave étaient bien au courant de ce stratégème mais laissaient faire. Comment en vouloir à une élève de savoir prendre des risques au nom de sa passion ? Depuis, elle n'avait eut de cesse de rêver d'un tour du monde des forêts et des jungles les plus secrètes. Toutefois, sa famille, ses études et la situation politique étant ce qu'elles étaient, ce projet demeura à l'état embryonnaire.
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Cela l'avait finalement conduite, et Elen s'en satisfaisait pleinement, à ouvrir sa propre boutique. Dédiée à toute sortes de végétaux plus ou moins méconnus – même dans le monde des sorciers – c'était là, la plus grande fierté de la sorcière.
Ca l'était d'autant plus dans des jours comme celui-ci, où elle pouvait partager ses connaissances avec une fillette aussi curieuse.Si son commerce n'était pas le plus imposant du Chemin de Traverse, il ne manqua pas d'attirer la curiosité de plusieurs clients qui, au fil de leurs visites étaient devenus des habitués et mêmes des amis. Du moins, les considéraient-elle en tant que tel. Il ne fallait pas grand-chose à Elen pour sociabiliser.
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Un jeune sorcier du nom de Thomas, si ses souvenirs étaient bons, avait fréquenté régulièrement le magasin durant plusieurs mois, avec un intérêt tout aussi sincère que le sien, pour les végétaux qui se développaient un peu anarchiquement dans la boutique. Le pauvre avait disparu, du jour au lendemain, sans donner la moindre nouvelle à la sorcière. Elen en fut sincèrement affectée, puisqu'hormis le professeur Chourave, jamais elle n'avait rencontré de personne aussi dévoué que lui dans le domaine. Elle se souvenait de lui, mais c'était surtout attachée à la femme qui l'accompagnait de temps à autres.
Margaret Macgregor, une écossaise, comme Elen , et qui l'avait contaminée de sa passion pour la lecture au fil de divers bavardages. Ces discussions qui remirent en lumière un timide lien entre leur familles respectives. Il fallait dire que la libraire qu'était Margaret avait une connaissance folle de ce genre d'histoires. Un petit conflit ridicule datant de presque cent ans, issu d'un quiproquo, et qui avait eut le don de créer une rivalité toute aussi stupide entre les Macgregor et les Slughorn. Une histoire de revendication de terrains. Rien qui ne suscita jamais plus que des petites querelles. Cette vieille histoire faisait plus rire les deux femmes qu'autre chose, à vrai dire, puisque les McGregor et les Slughorn étaient encore en froid aujourd'hui… et la grande majorité d'entre eux ne savaient plus pourquoi. Ce que les Ecossais pouvaient être susceptibles et rancuniers.
La confiance s'était établit tant et si bien qu'Elen trouva en Margaret une amie toute aussi précieuse que l'avait été Thomas.
Cependant, leur rencontres se firent bientôt plus rares, lorsque Margaret quitta la rue sorcière et commerçante la plus fameuse de Londres. Toutefois, Elen n'a jamais vraiment perdu espoir à ce sujet, et guette parfois son passage sur le Chemin de Traverse, pour une raison, tout ce qu'il y a de plus sérieux.
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La boutique de l'Herboriste attise la curiosité de toutes sortes de sorciers, avec qui Elen préférerait éviter d'avoir des ennuis. En effet, les Mangemorts passent de temps à autre, à la recherche de quelques ingrédients pour des usages que la sorcière fait mine d'ignorer. La visite de l'un d'entre eux – qu'Elen identifia plus tard comme étant le Superviseur des Raffleurs – lui fit tellement froid dans le dos, qu'elle prit alors la décision d'agir… à son échelle.
Recevant régulièrement la visite d'autres Mangemorts en quête d'ingrédients sordides, Elen ne manque pas de tenir au courant l'Ordre de leurs acquisitions par l'intermédiaire de la libraire, en qui elle a une confiance sans borne. Son visage naïf, son rire un peu nerveux et sa petite carrure la font passer pour un petit bout de femme influençable et dont il n'est pas nécessaire de se méfier.
« Grossière erreur pour les Mangemorts ! » Fanfaronne parfois la sorcière devant Gamora lorsque l'un d'eux quitte son échoppe.
C'est sa contribution, sa manière de résister sans pour autant perdre le moindre client. Au même titre que durant ses expéditions dans la forêt interdite, avec son rôle autoproclammé d'espionne, la sorcière prends encore des risques sans toujours en avoir conscience d'ailleurs.
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